Circulant dans un coin isolé de la capitale, Hayden se promenait en quête de lui-même, en quête d’un but quelconque. Le temps avançait et pourtant, il avait l’impression de stagner. La gravité semblait avoir soudé ses pieds au sol. Là où tout se mouvait et tout se hâtait, il était toujours bloqué au même endroit. Il avait l’impression d’être enchainé, comme s’il était condamné à devoir se perdre encore et encore. Malgré tout, il se sentait bien dans cette déchéance. Là où ses pensées lui donnaient des frissons et des pincements, il se sentait plus ou moins vivant. Trop de temps s’était écoulé depuis qu’il avait ressenti ce type d’émotions. Il appréciait sa solitude, beaucoup trop pour être normal. Il commençait à se plaire et à se sentir confortable dans ses sombres pensées. Le chevalier commençait même à en oublier sa propre personnalité. De nature résiliente, il inspirait tout sauf un rétablissement prompt. La blessure était intense et grugeait le moindre signe de rébellion que son corps lui envoyait. Il était englouti dans un cycle infini. Du moins, c’est ce qu’il pensait. Chaque fois qu’il se laissait trop bercer par cette torture psychologique, une voix le ramenait à l’ordre. Tantôt Shea, tantôt un homme inconnu, Hayden était sollicité. Sortant ainsi de sa torpeur, il réalisa que ses habits sombres ne suffisaient pas à exprimer son état d’esprit. Si son apparence physique décrivait le général Hayden Knight, son état psychologique manquait à l’appel.

-…

Les paroles qu’il tentait de prononcer se heurtèrent à une muraille trop forte pour lui. Se tournant pour avoir suffisamment de temps pour apercevoir les traits de celui qui le demandait, Hayden sut qu’il n’était pas une de ses connaissances. Le fait d’être connu était étrange. Alors qu’il en avait le moins besoin, les gens le reconnaissaient et tentaient de lui parler. La vie était une comédie.Les gens n’arrivaient aucunement à voir que ce n’était pas le bon moment. Ce faisant, le général se sentait constamment agressé comme à l’instant. Tel un voleur, Hayden reprit sa route en marchant de plus en plus vite. Il fuyait quelque chose dont il n’était pas conscient.

-Je n’ai pas le temps.


©Cain

La tristesse se transformait lentement, mais surement en colère. Tout comme ce fut le cas avec Shea, ses membres se mirent violemment à trembler alors qu’il serrait les dents. Sa mâchoire exerçait une pression proportionnelle à celle qu’il exerçait sur lui-même pour ne pas exploser. Le général était vraiment devenu une boule d’émotion. Son cœur brulait d’un désir ardent, celui de faire disparaître cet homme. Pire encore, il avait l’impression qu’il le faisait exprès. Était-il au courant de l’état du général? Probablement. Nul ne pouvait apercevoir une expression aussi furieuse sans réaliser qu’il ne fallait pas le déranger.

-Dégage.

Il tasse subitement Aamon sur le côté, sans se préoccuper des répercussions. Il devait fuir le plus rapidement possible. Il avait peur de perdre le contrôle, il avait peur de se montrer sous son vrai jour. Tel un monstre souffrant du syndrome d’abomination, Hayden se remet à marcher vers l’oubli. Pourtant, il avait la curieuse impression qu’il n’allait pas tarder à se faire déranger à nouveau. Ce faisant, il se concentre sur ses pensées pour ne pas exploser prochain dérangement. Quelques pas étaient suffisants pour qu’une distance respectable soit créée. Dès lors, il détalerait probablement comme un lapin. C’était la meilleure solution.



©Cain

Il est trop tard, Hayden commence à trembler violemment. Il avait déjà l’impression que sa vie tenait sur un mince fil. Or, pour rehausser la situation dangereuse dans laquelle il était, un couteau passe proche de sa tête et ose même lui arracher une mèche. Sur le coup, il observe l’arme , mais il n’arrive aucunement à la décrire. Tout ce qu’il voit c’est sa vision qui se brouille lentement avant de se décupler.

-Arrête!

Il met sa main sur sa tête et tombe sur ses genoux. Il avait l’impression d’être en pleine lutte. Contrairement à toutes attentes, ce n’était pas à Aamon qu’il s’adressait , mais à lui-même. Il n’était pas du genre à s’énerver facilement. Pourtant, des sons violents résonnaient dans sa poitrine. Il voulait combattre, mais il s’en empêchait. Son état d’esprit était si faible et brisé que son instinct primaire tentait de prendre le contrôle de son organisme. Hayden était dans un dilemme cacophonique et tentait de faire cesser les voix dans sa tête. D’un côté, il percevait l’importance de se défendre et de l’autre, il voulait simplement détruire son adverse. Oui, l’homme anciennement juste voulait lui faire payer cet affront pour être en paix pour toujours.

-Je ne veux pas te connaitre.

Se relevant faiblement, le général titube vers une zone dans laquelle il serait hors d’état de nuire. Il devait déguerpir, et ce , le plus rapidement possible. Par contre, son corps devenait de plus en plus lourd, tentant ainsi de le garder à proximité de son adversaire. Tel un cauchemar, il avait l’impression que son corps l’abandonnait et qu’il était dépendant de son poursuivant. Intérieurement, il priait pour que son agresseur ne soit pas en train de le suivre, mais il était trop tard : son esprit ne répondait déjà plus à ses commandes.

©Cain

Hayden avait un doute sur l’ampleur du choc. Il se demandait si l’attaque était plus choquante que la vue de son sang. La dernière personne qui avait fait couler son sang était Esel et il l’avait amèrement payé. Sur le coup, si Hayden était préalablement instable, il ne savait plus ce qu’il était. Aucun mot ne pouvait catégoriser son état d’esprit. Il avait mal. Il avait du mal à ne pas se précipiter sur cette nuisance pour lui arracher la trachée.

-Ce n’est pas parce qu’on vient de Caelestis qu’on est supérieur aux autres. Les humains sont tous capables du pire ou du mal, peu importe de quelle région ils viennent!

Soudain, plus rien. Hayden s’était simplement arrêté, comme si la réalité venait d’être figée. Or, l’instant d’après, la lame qui l’avait blessé tombait au sol tandis qu’il utilisait son autre jambe pour se propulser vers la nuisance. Son arme était déjà dégainée et il y allait pour l’assaut final. Une aura meurtrière était lisible dans ses intentions. Il ne visait rien de moins que la trachée.

©Cain

Sans sa blessure, la tête de son opposant aurait probablement roulé malgré sa réactivité. Au lieu qu’il ait sa paix, une simple mèche se détacha du corps adverse alors que celui-ci relançait une seconde attaque. Son style de combat était très peu orthodoxe, mais Hayden était en mesure de reconnaître son expérience. Il passait vraisemblablement pour un clown, mais ses mouvements étaient ceux d’un assassin. Sur le coup, le général analysait toutes ses informations sans s’en rendre compte. Généralement, il aurait pris le temps de reculer pour élaborer une technique. Or, une émotion violente le poussait à se déchainer sans réfléchir. Il avait besoin d’un corps sur lequel il pourrait se défouler, quelque chose qui lui permettrait de respirer. Ce faisant, il enchaîna directement une attaque, ne se souciant aucunement de la seconde lame ennemie qui venait de marquer son biceps. L’être kamikaze en lui se réveillait et il tentait d’échanger une profonde coupure au biceps pour la vie adverse. Ainsi, alors qu’il tentait de prolonger son mouvement du mieux qu’il le pouvait, Hayden tentait de triompher en sautant les étapes.


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Sous la pression adverse, Hayden n’avait nul autre choix que de reculer. Toutefois, vu sa position et la douleur à sa cheville, il dut y mettre un effort supplémentaire. Sur le coup, sa capuche tomba, dévoilant la mine affreuse qu’il arborait depuis peu. Des traits fatigués semblaient avoir possédé son corps. Toute sa vigueur semblait avoir disparu pour se concentrer dans un seul lieu, ses iris. Étrangement, ceux-ci étaient plus éclairés qu’à leurs habitudes. En fait, ses étaient éclatants, inspirant aisément la colère qu’il utilisait pour combattre. Sans attendre, il esquiva l’attaque adverse avant d’effectuer un second assaut. La vitesse d’échange était si rapide que son pendentif s’était éclipsé hors de ses habits. L’émeraude dans laquelle vivaient les mèches rosées d’un personnage qu’il avait rencontré par le passé bougea dans tous les points cardinaux en l’espace d’un court laps de temps. Pour une des rares fois, l’être réfléchi et calculé qu’il était se laissait bercer par la vague de sentiment qui l’animait. Il voulait vraiment faire souffrir cet élément perturbateur. Il voulait lui faire comprendre la douleur qu’il ressentait à l’instant présent. Pour une fois, l'esprit sauvage entourerait l'esprit noble et respectable. Le pendentif représentait directement cette métaphore, arborant le côté naturel d'Earthea qui englobait la rationalité du pays du ciel. Hayden était exactement dans cette situation.



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L’ivresse du combat venait d’atteindre son sommet depuis un bon moment et ce n’était qu’une question de temps avant que la flamme ne s’éteigne. Ils avaient tous deux passé un bon moment à se jauger et bientôt, le plus fort risquait de prendre le dessus et de renverser l’autre. Il ne faisait aucun doute que cette personne risquait d’être Hayden. Même blessé, il ne craignait pas l’attaque qui se dirigeait vers son corps. Au contraire, il allait vers celle-ci, désireux de désarmer son adversaire avec sa force brute. Il savait que son épée était plus robuste et considérait que ce n’était qu’une question de temps avant que l’arme d’Aamon n’éclate sous la pression.



©Cain