Nous étions enfin arrivée dans mon antre. Un doux foyer, entre autre. Je l'a fis entrer avant de fermer la porte derrière moi. Je n'avais qu'une seule envie en rentrant chez moi, c'était bien d'aller m'allonger un peu. Mais le travail passe avant tout. Surtout quand on a une invitée chez soi. J'avançais dés alors dans le salon, avant de la retrouver dans un drôle d'état dans l'un de mes canapés. Dormant à poing fermés.

Un autre lui aurait déjà sauter au cou pour l'examiner sans plus attendre, dans son état, cela ne pouvait que faciliter l'étude sur son problème.

Mais je n'aimerais pas voir en colère face une attitude très irrespectueuse et favorisant la peur dans son esprit.

Je résistais à l'envie de l'étudier, sans grand effort. Je me posais alors face à elle, dans un autre fauteuil. Ma lecture était pour le moment plus passionnante et sans danger envers elle. Je jetais un coup d’œil quelques fois, attendant patiemment le réveil de "la belle aux bois dormant".

Le diagnostic général va devoir attendre, en espérant qu'on soit pas parti pour qu'elle dorme des heures.

Les minutes passèrent, les yeux rivés sur elle constamment, entrecoupé de quelques phases de lectures, la voyant dormir paisiblement, je commençais même à penser que j'aurais aimer avoir une fille comme elle.
Mais mon mode de vie et ce que je préparais à l'avenir était incompatible pour élever un enfant. Mon humeur se teinta alors d'une certaine mélancolie passagère. Mais je gardais en tête que c'était bien moi qui avait décider de vivre avec ce train de vie.

Elle se réveilla finalement de son songe, une heure après. Le réveil est dur visiblement, comme si elle se réveillait d'un lendemain de cuite, de manière plus rapide et plus efficace, cela dit.
En se redressant au fond du dossier, se frottant les yeux de manière enfantin, elle m'interpella avec une tirade bien intrigante. M’appelant par la même occasion dans son état second, "Professeur" comme si elle voyait en moi, ce vieux Erland. Mes pensées d'avant se mirent à revenir au galop. Un très léger sourire sincère se dessina alors sur mes lèvres, jusque là, neutre.

Elle sursauta d'un coup, comme si son sang n'avait fait qu'un tour, en se rendant compte de son erreur, me demandant pardon de manière extrêmement gênée.

Quelques instants après s'être calmé, elle repris alors une attitude sérieuse, me regardant intensément, me demandant quel était mon opinion sur sa situation.

« Et bien ... »

Je posais alors le livre sur la table basse et je me levais en prenant appui sur l'accoudoir, me rapprochant de la table du salon où j'avais poser ma valise.

« M'avancer sur la question pourrait être suffisamment déplacé sans que je vous examines. Mais si vous y tenez tant ... »

Je m'avançais vers elle avec un tabouret.
Ses yeux étaient alors rivés sur ma bouche.

« Je pense que votre problème de sommeil serait une sorte de narcolepsie, une hypersomnie si vous préférez. Une maladie rare et qui débute le plus souvent à l'adolescence.
Bon je pense bien que c'est la version des faits que les médecins avant moi ont dû vous conter, avec le jargon médical en prime.

Mais il y a un hic à cette solution, c'est que si c'était réellement cette maladie, vous resterez alors en éveil qu'une à deux heures pour vous évanouir subitement. De plus, si on ajoute que vous devriez avoir des attaques de cataplexie se traduisant par un relâchement musculaire brusque en pleine activité, sans oublier les hallucinations, ce qui ne semble pas être votre cas.

Ah oui, j'ai oublié de mentionner que les crises sont souvent déclenchées par une émotion positive, ce qui n'est pas votre cas en une fois, à part si vous m'apprenez que vous êtes tomber amoureux de mon fauteuil...

C'est donc pas ça, vous devez déjà le savoir.
Vraisemblablement, je suis pas plus avancé que vous, à vrai dire ... C'est bien pour ça que je dois faire des vérifications, avant de décider de la suite.

Mais vous pouvez toujours me dire si vous avez des suggestions ou d'autres problèmes autre part, cela pourrait toujours aider dans mon diagnostic.
»

Je me sentais réellement mal à l'aise face à ça. Au fond de moi, je jubilais de découvrir le pot-au-rose mais d'un autre coté, j'étais alors tiraillé par un sentiment bien étranger à d'habitude. Peut-être une certaine tristesse pour son cas. Une tristesse ancrée comme si on me poignarder le cœur de la voir se décomposer, c'est pas comme si c'était une méchante fille, peut-être depuis toutes ses années, je me suis légèrement attachée à elle. Ce qui va à l'encontre de mes principes mais bon.

Malgré mes états d'âmes, j'avais pu faire reculer l'échéance, pour avoir plus de temps pour réellement cerner si mon instinct et mon expérience ne se trompaient pas, la prochaine fois que je devrais ouvrir la bouche, le drame risque de se produire et tout cela n'aura servi qu'a mieux essayer de reculer pour mieux tomber, au final.

Le sujet est réellement épineux et malgré mes mots, la vérité risque de la détruire et j'en serais le responsable.

Évidemment ma réponse ne lui plaît pas, elle se leva alors pour regarder tout et rien à la fois. A ce moment là, je me tut. Observant calmement sans un mot. Elle continua à me faire patienter pour finalement rester devant l'une de mes fenêtres qui donnait sur la capitale.

Elle m'expliqua alors qu'elle avait peut-être une idée complémentaire, malgré son ton quelque peu lassé. Une association d'idées religieuses, philosophique et scientifique sur le repos nécessaire. La métaphore n'était pas bien loin, selon moi.

Elle retourna alors à sa place qu'elle s'était elle-même désigné dés notre arrivée chez moi.

Et me posa alors dans la continuité, cette fameuse question que j'attendais, malgré la pointe d'ironie perceptible. En rappelant dans la même veine où nous étions, la grande cité scientifique et abordant le transhumanisme, Okeanos.

Elle plongea alors la tête dans le fond du canapé, les yeux fermés.

L'air un peu amusé, les bras croisés, je trouvais réellement intéressant la question qu'elle abordé.

« A mon sens, Okeanos est la ville de toute les folies scientifiques, nombre de scientifiques et d'ingénieurs pour travailler d'arrache pied pour l'avancée technologie qui nous rend si fier. Mais de là, à penser que vous n'êtes pas humaine, n'est ce pas un peu gros comme théorie ? Je pense qu'aucun homme n'est capable, à l'heure actuelle, de créer un automate aussi perfectionné pour reproduire les émotions humaines et tout ce qui rend la biologie de nos corps si fascinant, par leur fonctionnement. »

Je m'arrêtais alors la voyant m’abandonner peu à peu dans mes explications.
Je décidais alors de traiter du sujet central.

«
Mais malgré votre ironie sur ce sujet, je pense qu'au final ce qui vous tracasse réellement, c'est bien cela.
Avez-vous peur d'être une création de l'homme ?
C'est une peur qui revient fréquemment chez certains de mes patients, c'est le revers de la médaille de notre société, toujours de plus en plus avant-gardiste. Un stress post-trauma et une paranoïa qui revient quelques fois. Ce qui pourrait expliquer votre humeur changeante quand j'aborde le thème de cette visite médical. Vous avez peur de découvrir quelque chose que vous regretteriez.

Mais si je peux me le permettre, si c'est le cas, comprenez bien que cela restera entre nous et ne sortira jamais d'ici. Vos problèmes sont aussi mes problèmes. Et vous savez combien je suis soucieux de vos problèmes, sinon on serait pas ici à parler, cela aurait déjà été fini dans le couloir Polypus. C'est vrai que ce sujet vous mette dans un état pareil, sans savoir en parler à qui que ce soit, vous n'avez plus réellement de proches à qui en parler et si vos doutes sont véridiques ou pas, cela risquerait de vous anéantir.

Je souhaite faire un geste, en tant que votre médecin traitant et être humain. Vous en savez peu sur moi, il est vrai. Votre confiance en moi est légère et éphémère mais je souhaite partager des détails sur ma vie, en preuve de bonne foi et de confiance mutuelle. »

Je lui tendis alors la main droite devant elle comme devant un pacte d'accord, hochant la tête.

Encore un plan, un plan que je n'avais tenté jusque là. Risqué comme un champ de mine, mais je tentais le tout pour le tout pour elle.