Au cours de l'après-midi, Dastan s'était souvenu d'une information essentielle : il avait déménagé entre leur dernière rencontre et aujourd'hui. Et ce détail, bien qu'anodin, risquait de pourrir toute la soirée si Rozen l'attendait à la porte de son ancien appartement. Il avait donc prit l'initiative de lui faire parvenir un petit message et il l'attendait maintenant à l'entrée du palais, adossé au mur de pierre de l'entrée. Et pour la première fois de sa vie, il ressentait une pointe de stress à l'idée de merder une soirée avec une représentante de la gente féminine. Mais elle, elle était un peu plus spécial que n'importe quelle autre femelle qu'il avait pu croiser, dans son lit ou ailleurs.
Pour elle il avait du respect et de l'affection, pour elle...
Il souleva son bras et renifla son aisselle dans un geste gracieux, avant de faire une grimace étrange. Pas terrible tout ça. Peut mieux faire Don juan ; peut-être aurait-il du prendre le temps de se laver avant...
Ou pas. Il sourit. Qu'importe.
Dastan regarde avec impatience l'heure qui tourne et qui tourne et en fait, à force d'attendre assis contre le mur de pierres chaudes, il commence lentement à s'endormir le cochon...

Dastan garde les yeux clos, une voix familière chatouille son tympan. Il sourit, quel son délicat. « Je ne dors pas Jeune fille, je réfléchis. » Et il ouvre un œil qu'une lueur amusée fait briller dans la lumière déclinante du jour. Sans prendre appui sur ses mains, il se relève d'un bond, étirant sa carcasse dans un craquement d'os. Il lance un regard complice et passe son bras au dessus des épaules de la jeune femme ; en avant, il l'entraîne tranquillement, dans les rues de Cassiopea qu'il connaît par cœur. Déménager avait été une décision hâtive et réfléchie à la fois, mais aujourd'hui, il ne le regrettait pas. Certes, il se trouvait plus loin de Gestalt à présent. Mais plus près de Rozen évidemment. « On y est presque. » Dit-il en volant au passage, un baiser à la rousse.
Et bien sur, quelques minutes plus tard, ils se trouvent face à l'entrée de son nouveau chez-lui. La clé tourne dans la serrure et la porte s'ouvre sur un appartement un peu moins grand que celui qu'il occupait avant, mais tout aussi bien agencé. « Voilà voilà, j'vais te montrer la cuisine et y a une chambre d'amis t'inquiètes pas, tu seras pas obligée de dormir avec moi »
Il sourit, sert son bras autour de la jeune femme et plante un baiser sur son front avant de la lâcher.

Dastan sourt et se frotte le nez. Il emmène d'abord Rozen à la cuisine... Cuisine qui est encore immaculée.
Et c'est normal quand on sait qu'il préfère manger des aliments lyophilisés plutôt que ses propres plats. Le fier Bras-droit a bien trop peur de s'empoisonner lui-même. « Il y a plein de truc dans le frigo et dans les placard et... Si t'es sage... » Il claque sa main sur la fesse à sa portée. « J'ai pensé au whisky. »
Tandis qu'il la laisse faire le tour du propriétaire, l'homme se met en quête de vêtements à lui prêter. Dastan pose sa veste et se dirige vers la chambre. Il fouille dans ses placard et dans ses tiroirs et en sort des habits qu'il met d'ordinaire pour rester à la maison, assez simple pour aller à Rozen sans qu'elle s'y sente mal à l'aise. Il ressort avec un t-shirt gris et un short noir en molleton et les lui tend avec un petit sourire « Tiens, j'ai pas de culotte à ta taille par contre et de toute façon, tu la garderais pas longtemps... » Il tire la langue dans une grimace idiote et lui désigne la salle de bains pour qu'elle puisse changer, si la pudeur lui en dit. Il s'assied sur le canapé en attendant et pousse un soupir bienheureux.

Avachi sur le canapé, Dastan fixe le plafond d'un regard vide, un sourire bienheureux toujours fiché sur son visage. Le blanc immaculé de la peinture lui pique un peu les yeux et une odeur délicate de musc s'échappe de la salle de bains quand la porte s'ouvre. Il penche la tête en arrière un peu plus, ça lui donne le vertige quelques secondes. Puis Rozen entre dans son champ de vision et tout va mieux. Il délie ses lèvres pour accueillir un baiser avec plaisir ; humant au passage les douces effluves s'échappant des cheveux de la jeune femme. L'eau dans la casserole commençait à chanter, bouillonnant en petits remous. Il passait et repassait ses mains sur les cuisses blanche dans une caresse douce ; la pulpe de ses doigts chatouillant les lignes courbes.
« ça me semble parfait Femme. » Une moue amusée fait apparaître des petites rides au coins de ses yeux ; sous le short ses doigts s'égarent, quelques instants. Il rêve de l'empoigner contre le plan de travail pour la prendre sans rien ôter. Mais pas tout de suite, Dastan grogne, il sera doux pour le moment. Trop faim. « Allez, au boulot, j'ai vraiment super faim. Pendant que tu cuisines, j'nous servirais un verre. » Un sourire.

Arf. Il la laisse s'en aller vers un but plus noble que celui qu'il souhaitait secrètement. Mais son ventre grogne bien plus fort que lui-même et la perspective d'un bon repas le fait presque autant saliver que la vision du postérieur de Rozen qui s'éloigne. Il sourit, maintenant allongé sur le canapé. Les bruits qui s'échappent de la cuisine ouverte annoncent les prémices de la soirée ; un bâillement le fait souffler. Dastan se lève, et les mains dans les poches, il vient s'appuyer au plan de travail pour regarder la jeune femme faire à manger. Il trouverait ça presque sensuel quand c'est elle aux fourneaux. « Si tu n'étais pas en train de tripoter cette poêle brûlante, tu n'aurais déjà plus de short. » Délicate remarque. Il tire la langue et se met en quête de la bouteille de whisky et de deux verres. Cinq minutes plus tard, les verres étaient prêts et Dastan avait même eut la brillante idée de mettre la table sur la table basse en face du canapé. « Allez trinquons ma Jolie. À ton poisson qui, ma foi, a l'air appétissant. » Il lui tend son verre, un sourire aguicheur au lèvres.

Dastan tapote l'accoudoir du canapé rouge qui trône au milieu de son salon ; de la poussière s'en échappe un peu, virevoltant dans les dernières lueurs du jours. Oui , décidément, il a bien fait de déménager. Le fumet délicat du saumon dans son assiette le fait saliver au point qu'il manque de baver. Une gorgée d'alcool, un sourire, un tchin-tchin. Et Dastan s’attaque à l'assiette avec voracité ; mangeant comme si sa vie en dépendait, comme d'habitude. «  Hm ! C'est même pas empoisonné ! » Lance-t-il la bouche pleine. Il mâche et avale, non sans faire des bruits de mastications tout à fait dégoûtant. La télévision s'allume sur une émission sans intérêt. Et Dastan a tôt fait de terminer totalement son assiette ; un soupir repu plus tard, il engloutit la dernière gorgée d'alcool dans son verre. Son ventre ne crie plus famine, il pose sa main sur la cuisse de Rozen.
Qu'elle ait fini de manger ou non, l'homme impatient vient chatouiller le creux de son cou avec sa bouche. ; et son oreille sur laquelle il souffle. « Merci pour le repas. » Il passe la langue sur ses lèvres, haleine de poisson et ça le fait sourire.

Il y a une sorte de maladresse tendre dans sa façon de se tenir, il vacille. Le silence est trouble ces quelques secondes entre la question et sa réponse. Dastan ne cille pas, ses pupilles restent immobiles. Il jauge, juge, observe d'un œil attentif chaque micro-expressions, chaque plis, chaque respiration. Il a entendu, entendu quelque chose qui fait battre son cœur si fort à l'intérieur de sa poitrine qu'on croirait qu'il veuille s'en échapper. Il ferme les paupières une seconde, frissonne au contact sur sa joue. Il sue, il a chaud, il est soudainement si fatigué. Mais son corps reste figé, incapable de bouger. « Tu mens. Tu fais ce truc avec ta bouche quand tu mens. »Il sourit, doucement. Et soupire. « Rozen, s'il te plaît, j'ai besoin que tu le dises une nouvelle fois. » Sa phrase sonne comme une supplique. Il se connait mieux que quiconque et il sait... Il sait que si elle se défile une nouvelle fois, il n'y aurait plus de chance. Il finirait par merder, comme toujours ; il merderait avec Rozen comme il avait toujours merdé avec tout le monde. Et cette perspective l'angoissait, elle faisait trembler ses bras et ses jambes.
Il sourit, attend. Maladroit comme un adolescent.

Dastan se laisse tomber, il s'éloigne sur le matelas, soulageant bras et jambes du poids de son corps fatigué. Mais sur ses épaules le poids ne disparaît pas. Le poids d'un sentiment qu'il préférerait ne jamais avoir rencontré ; désormais son esprit est en proie à des interrogations qu'il a toujours évité tout au long de sa vie. Dastan est Don Juan, il n'est pas Charmant. Ça n’est pas son rôle dans ce monde, Esel ferait un bien meilleur Charmant que lui. N'importe qui serait mieux que lui pour ces choses là. Il tourne la tête vers Rozen, les lèvres serrées dans un petit sourire doux. Il caresse avec tendresse les cheveux de la jeune femme, qui murmure une phrase en demie-teinte. Dastan pousse un petit soupire amusé. « Moi aussi je t'aime bien. »
Il marque une petite pause, et se passe la main sur le visage. Arf, fait-il. Une impasse. Il est dans une impasse. Impossible de savoir où aller, dans quel sens, avec quels mots, alors il arrête la les confidences.
Il ne veut pas insister, il ne veut pas qu'elle se braque.
« Allez » Il pose un baiser sur son front, claque sa fesse. « À la douche. »
Il sourit, comme si tout ça n'était rien, comme s'il n'était pas touché. Pourtant il y a quelque chose de résigné dans ses yeux, d'un peu douloureux.

Dastan regarde la femme qui occupait son lit, s'éloigner vers la salle d'eau. Il entend le bruit de la douche qui se met à couler, la porte et le reste. Mais son corps est comme cloué au lit. Il lance un regard sur ses draps. Tâchés. Un grimace déforme son visage tandis qu'il frotte vigoureusement son visage fatigué. L'amour, qu'est-ce que cela implique ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
A-t-il seulement bien entendu ?
Bien sur qu'il a bien entendu.
Dastan soupire, les yeux rivés au plafond, incapable de mettre des mots sur ce que cette révélation déclenche chez lui. Le temps s'égraine doucement et il finit par se lever, et se glisser dans la douche. Avec douceur et lassitude. La fatigue tombe sur lui comme un étau. Il ferme les yeux en profitant de la tendresse que lui offre cet instant d'intimité avec la jeune femme. Il sait qu'elle ne dira rien de plus la dessus, il la sent filer entre ses doigts à mesure que le temps passe. L'eau chaude lui fait du bien, mais elle ne dissout pas le silence gêné qu'il y a entre eux. Quelques minutes plus tard, Dastan se retourne. « Allez, tourne toi. À ton tour. » Il attrape le shampoing d'une main et entreprend de laver la longue chevelure rousse de la jeune femme. Et malgré toute la délicatesse du monde, il regarde écarquillé toutes ces mèches, es tenant au dessus de sa tête. « Wow... Comment c’est possible d'avoir autant de cheveux. » Ça le fait sourire quand même. Il ne sait pas faire autrement.